Aix-les-Bains, Riviera des Alpes

En 2024, les Amis de Léoncel ont choisi d’emmener leurs membres en Savoie. C’est ainsi que les 5 et 6 juin, 36 personnes ont pu découvrir quelques lieux, parfois méconnus, d’Aix-les-Bains et du Bourget-du-Lac. Les déplacements se sont effectués en autocar.

Malgré quelques petites modifications imprévues du programme initial, nos deux journées ont été bien remplies.

En arrivant à Aix, nous avons commencé par une visite guidée du musée Faure, installé dans une belle maison de style génois du début du XXe siècle, la « villa des Chimères ». Le groupe a été scindé en deux parties afin de s’adapter à l’étroitesse des salles à visiter.

Les collections du musée sont essentiellement issues d’un legs effectué par le docteur Jean Faure (1862-1942) à la ville d’Aix-les-Bains. Le premier étage est consacré à la peinture, tandis que le second contient une importante collection d’œuvres d’Auguste Rodin, la deuxième plus importante de France.

La peinture fait la part belle au mouvement impressionniste, avec des artistes comme Boudin, Cézanne, Corot, Degas, Jongkind, Pissarro et bien d’autres. Les œuvres sont présentées de façon à faire percevoir l’évolution du mouvement sur la deuxième moitié du XIXe siècle et le début du XXe.

Albert Marquet – Vue de Paris, quai du Louvre – 1906

Musée Faure, Creative commons

Eugène Boudin – Rouen – 1895

Eugène Boudin, Public domain, via Wikimedia Commons

Edgar Degas – Danseuses en violet – vers 1880

Musée Faure, Creative commons

L’étage consacré à la sculpture est également très riche, notamment d’œuvres d’Auguste Rodin (1840-1917).

Auguste Rodin

La Danaïde – Bronze, 1889

Morio60, CC BY-SA 2.0 https://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.0, via Wikimedia Commons

Auguste Rodin

Manon Lescaut – Terre cuite, vers 1882

Morio60, CC BY-SA 2.0 https://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.0, via Wikimedia Commons

Notre autocar nous a ensuite conduits vers le Grand Port d’Aix, où nous avons pu prendre place à bord d’un bateau pour une croisière-déjeuner fort agréable. Le temps était beau et le lac parfaitement calme.

Le capitaine nous a fait longer toute la moitié sud du lac, depuis Aix jusqu’à l’abbaye d’Hautecombe où nous avons fait escale.

Située sur la rive ouest du lac, en face d’Aix-les-Bains, l’abbaye d’Hautecombe est fondée en 1139 par l’abbé cistercien Amédée de Clermont d’Hauterive, avec l’appui des comtes de Savoie, et sur l’impulsion de Saint Bernard en personne. Une petite communauté venue de l’abbaye d’Aulps en Chablais était à l’origine, depuis 1101, installée plus haut dans la montagne (d’où son nom) près du bourg de Cessens. Le pays de Cessens devenant trop fréquenté, Amédée de Clermont transporte en 1139 sa communauté sur un domaine qu’il venait de recevoir en don, sur les bords du lac.

Entre le XIIe et le XVIe siècles, l’abbaye sera la nécropole de la Maison de Savoie. À partir du XVe siècle, l’abbaye est confiée à des abbés commendataires, et va connaître une phase de déclin et de dégradations. En 1794, les révolutionnaires français annexent la Savoie à la France, et chassent les derniers moines. L’abbaye est pillée, transformée en usine, puis tombe peu à peu en ruines.

Au début du XIXe siècle, la Savoie est restituée au royaume de Piémont-Sardaigne, et à partir de 1824, le roi Charles-Félix entreprend de relever l’abbaye. Il y sera inhumé, ainsi que son épouse, renouant avec l’ancienne tradition. Des moines cisterciens venus de Sénanque s’installeront à Hautecombe après le rattachement de la Savoie à la France en 1860. Actuellement, c’est la communauté du Chemin Neuf qui a pris le relais et qui continue l’animation spirituelle des lieux.

Seule l’église est actuellement ouverte à la visite, au moyen d’audioguides.

Le bateau nous a ensuite ramenés à Aix, où nous nous sommes installés dans un hôtel du centre-ville pour le dîner et la nuit.

La journée du lendemain a débuté par une déambulation dans le centre-ville à la découverte de quelques palaces du XIXe siècle. Ces immeubles, au décor somptueux, ont été édifiés pour permettre l’accueil d’une clientèle cosmopolite de plus en plus nombreuse, en villégiature ou en cure thermale.

L’arrivée du chemin de fer en 1860, et la fréquentation de personnalités prestigieuses comme la reine Victoria ont participé puissamment au développement du tourisme.

Les « pensions » traditionnelles ne pouvaient alors plus faire face à cet afflux, et ne répondaient plus aux attentes de l’époque en termes de confort (chauffage, salles de bains, etc)

Après cette visite, empreinte d’une certaine nostalgie pour une époque et une façon de vivre révolues, nous nous sommes dirigés vers le Bourget-du-Lac, à l’extrémité sud du lac où nous avons déjeuné. Les aménagements de voirie de la ville sont malheureusement conçus pour dissuader les autocars, et c’est avec quelques difficultés que nous sommes arrivés à destination. La pluie a débuté peu de temps après notre arrivée au restaurant, et elle ne nous a plus quittés.

L’après-midi devait comporter la visite du prieuré du Bourget-du-Lac puis celle du château de Thomas II de Savoie. Toutefois, le transfert d’un site à l’autre nécessitait de faire environ 800 m à pied, et compte tenu du temps, nous avons convenu avec notre guide de rester au prieuré pour une visite plus approfondie.

Il s’agit d’un ancien prieuré clunisien, fondé semble-t-il autour de 1030, par Saint Odilon. Ce dernier, au retour d’un voyage au Mont-Cassin, tombe malade et est hébergé au Bourget-du-Lac. Une nuit, il voit en songe le comte de Savoie accompagné de Saint Maurice, qui plantent une croix devant lui. Puis le saint le touche, et il se réveille guéri.

Odilon ne doute pas qu’il s’agisse d’un signe divin, et décide de faire bâtir un prieuré dédié à Saint Maurice et fait venir des moines de Cluny pour son service. L’église initiale, fort petite, est conservée sous l’église actuelle et en constitue une sorte de crypte. Elle a probablement été bâtie au-dessus d’un sanctuaire païen comme en témoigne une inscription faisant apparaître le nom de Mercure sur la base d’un ancien autel.

Photo du prieuré Florian Pépellin

L’église actuelle, dédiée à Saint Laurent, date du XIIIe siècle. Elle servait de lieu de culte aux habitants du lieu, et une partie du chœur, réservée au prieuré Saint Maurice, était séparée du reste par un jubé maçonné, orné d’un ensemble remarquable de panneaux sculptés polychromes représentant la vie du Christ. Ces panneaux sont aujourd’hui disposés autour du chœur. Il en manque quelques uns, exposés au musée Savoisien à Chambéry.

Le prieuré est très proche, quelques centaines de mètres, du château construit en 1248 par Thomas II, comte de Savoie, et qui sera pendant longtemps une des résidences favorites de la famille.

Le cloître devait à l’origine comporter quatre galeries couvertes sur les quatre côtés. Une seule a été construite, de style roman. Au XVe siècle, d’importantes modifications sont apportées à l’ensemble des bâtiments, sous l’influence notable de deux prieurs issus de la famille de Luyrieu : l’église, charpentée jusqu’alors, est couverte de voûtes, et la galerie romane du cloître est démontée, remplacée par une galerie gothique, tandis que la galerie romane est reconstruite au-dessus.

Au XVIe siècle, les moines de Cluny vont laisser place à une congrégation de Jésuites (1582), qui seront eux-mêmes remplacés au XVIIIe siècle par des Franciscains (1773). Au moment de la Révolution, le prieuré est vendu comme bien national, et passe en mains privées. Il devient une exploitation agricole et subit d’importants dommages.

À la fin du XIXe siècle, il est acheté par un amateur d’art chambérien, M. Barut, qui obtient le classement d’une partie des bâtiments au titre des Monuments Historiques, et entreprend des travaux de restauration. La première moitié du XXe siècle sera marquée par l’action de la duchesse de Praslin-Choiseul, une riche américaine, qui rachète le prieuré en 1912. Disposant d’importants moyens financiers, elle amplifie les travaux de restauration, et crée de beaux jardins à la Française.

Le prieuré servira notamment de lieu d’accueil pour des soldats américains pendant la 1ère Guerre Mondiale.

Après le décès de la duchesse en 1939 et la période de la Seconde Guerre, ses héritiers vendent l’ensemble des bâtiments et des jardins à la commune du Bourget-du-Lac en 1952.

Sauf mention contraire, images A. Ainardi