Fondée en 1137 par douze moines venus de l’abbaye cistercienne de Bonnevaux, l’abbaye de Léoncel s’imposa vite comme le monastère le plus important du Vercors par son rayonnement et par l’étendue de son domaine. Son histoire se nourrit d’éléments originaux :
– une situation et un site remarquables, aux confins des Alpes vertes et des Alpes de Lumière, dans un val humide tout à l’ouest du Vercors, près des pas donnant accès à la plaine de Valence ;
– la construction, entre 1137 et 1210, d’une belle abbatiale romane, demeurée au cours des temps proche du monument primitif ;
– la fusion, en 1194, de l’abbaye avec la communauté religieuse de La Part-Dieu, en plaine, entraînant la descente des moines de Léoncel chaque année, de la Saint André à Pâques ;
– le voisinage des Chartreux du Val-Sainte-Marie de Bouvante ;
– une belle maîtrise du terrain, permettant aux cisterciens de Léoncel d’associer dans leur domaine temporel des éléments des plateaux et vals proches de l’abbaye, du bassin de la moyenne Gervanne, de la plaine de Valence et de la montagne d’Ambel.
En dépit de ces traits originaux, le destin de l’abbaye apparaît classique dans ses quatre temps successifs :
- celui de l’apogée, forgé par un demi-siècle de ferveur et de travail, avec la construction de l’abbatiale, la naissance du domaine, les fructueuses relations avec l’environnement religieux ou féodal et l’élargissement de la communauté, apogée atteint au XIIIe siècle, mais terni par le piège d’acquisitions trop nombreuses, par les premiers affrontements et le glissement au faire-valoir indirect ;
- celui des troubles, aux XIVe, XVe et XVIe siècles, marqués par les conflits féodaux ou religieux et par les difficultés avec les villageois, avec, heureusement, des répits et des renaissances ;
- celui de la décadence des XVIIe et XVIIIe siècles, avivée par l’instauration de la commende en 1681, des difficultés morales et financières et par d’incessants conflits et procès, jusqu’à la disparition pendant la Révolution (1790), alors que seule la paroisse survit ;
- celui de l’histoire posthume, marquée par la vente du domaine (l’État conservant les forêts), par le classement de l’abbatiale en 1840, par la création de la commune de Léoncel en 1854, par la recherche historique, par le rayonnement spirituel et culturel actuel.